Des Discussions Difficiles – III
Deux objections mettent en relief la nature, les buts et les limitations des discussions doctrinales qui doivent s’ouvrir bientôt entre les autorités romaines et la Fraternité Saint-Pie X. Selon la première objection, la Doctrine Catholique n’est pas discutable. Selon la seconde, aucun Catholique ne peut prétendre discuter sur un pied d’égalité avec les représentants du Pape. Dans des circonstances normales, ces deux objections sont valables, mais nous ne sommes pas dans un temps normal.
En ce qui concerne la première objection, bien évidemment la doctrine Catholique inchangée et inchangeable ne peut pas être discutée. Le problème à présent, c’est que Vatican II a entrepris de la changer. Par exemple, un état catholique peut-il ou doit-il tolérer la pratique publique de religions fausses ? La Tradition Catholique dit que c’est le « peut » qui vaut, mais uniquement pour éviter un plus grand mal ou pour atteindre un plus grand bien. Par contre Vatican II dit que c’est le « doit » qui vaut, et ce en toutes circonstances. Mais si Jésus-Christ est reconnaissable comme étant Dieu incarné, alors pas plus que le « peut » n’est vrai. En revanche, si le « doit » est vrai, alors Jésus-Christ n’est pas nécessairement reconnaissable comme étant Dieu. Le « peut » et le « doit » sont aussi loin l’un de l’autre que Jésus-Christ Dieu par nature divine est loin de Jésus-Christ Dieu par choix humain. C’est toute la distance entre Jésus-Christ étant, et n’étant pas, objectivement, Dieu !
Et cependant, les autorités romaines d’aujourd’hui prétendent que la doctrine de Vatican II n’est pas en rupture mais en continuité avec le dogme Catholique. A moins donc – à Dieu ne plaise ! – que la Fraternité ne trahisse elle aussi le dogme Catholique, ce n’est pas discuter si Jésus est Dieu ou pas que la Fraternité entend faire, ni soumettre la doctrine Catholique à la discussion. Elle espère plutôt persuader tout Romain capable encore de l’entendre que la doctrine de Vatican II contredit gravement la Doctrine Catholique. Et même si très peu de ces Romains sont capables de l’entendre, la Fraternité estimera néanmoins qu’il aura été de son devoir de rendre ce témoignage à la Vérité.
Mais les autorités Romaines pourraient répondre : « Nous représentons le Pape. Comment osez-vous prétendre discuter avec nous ? » C’est la seconde objection ; et pour toute personne qui pense que la Rome Conciliaire est dans la Vérité, cette objection apparaît valide. Mais, c’est la Vérité qui fait Rome et pas Rome qui fait la Vérité. Notre Seigneur Lui-même a déclaré de façon répétée dans l’Évangile de St. Jean que sa doctrine n’est pas de lui mais de son Père (par exemple dans St Jean VII, 16). Mais alors, s’il n’est pas dans le pouvoir de Jésus de changer la Doctrine Catholique, encore moins est-ce dans le pouvoir de son Vicaire le Pape ! Si donc un Pape, par l’usage du libre-arbitre que Dieu lui a imparti, choisit de s’éloigner dans une certaine mesure de la Doctrine Catholique, alors, tout en restant Pape, dans cette mesure-là il met de côté sa dignité de Pape, et dans la même mesure il se met avec ses représentants en dessous de quiconque reste fidèle à la Doctrine du Maître divin.
Autrement dit, cette dignité que le Pape met de côté pour autant qu’il se départit de la Vérité sera assumée par tout Catholique qui reste fidèle à la Vérité. Comme l’a dit Monseigneur Lefebvre dans une réplique fameuse aux autorités Romaines qui l’interrogeaient sur ses dissensions avec le Pape Paul VI : « C’est moi qui devrait vous interroger ! ». Faire valoir la Vérité de Dieu le Père est la fierté et l’humilité, la vocation et la gloire de la petite Fraternité de Monseigneur Lefebvre. Si jamais il y avait le moindre danger que ces discussions avec Rome fissent abandonner à la Fraternité cette vocation, c’est à ce moment-là qu’il ne faudrait absolument plus discuter !
Kyrie eleison.