LA PUISSANCE DU CHAPELET

Allons au Ciel par la plus simple des prières,

Loué par tous les saints, l’humble et très sûr Rosaire.

Quand la semaine dernière (n° 890 du 3 août) ces Commentaires ont conclu que le Rosaire était la solution à l’actuelle folie de ces prétendues lois de l’Église que la Rome moderniste veut soi-disant nous imposer, nombre de lecteurs ont pu se demander quel pouvait être le lien entre les deux. Comment l’Église peut-elle, pour ainsi dire, se décharger de tous ses problèmes sur le Rosaire  ?

Pourtant, avant qu’elle ne fût remplacée dans les années 1960 par un fantoche plus manœuvrable par les modernistes, sœur Lucie de Fatima affirma que Dieu, à notre époque, avait donné au Rosaire une puissance spéciale telle, qu’il peut résoudre tous les problèmes. Les catholiques (et les non-catholiques) doivent croire à cette puissance, en prévision des épreuves imminentes qui vont fondre sur le monde. Et voici la clé  : dans le meilleur des cas, le monde qui nous entoure réduit Dieu à une coquille vide. Or, la prière du Rosaire rétablit peu à peu la réalité de Dieu dans les âmes humaines. Voyons d’abord comment l’homme produit l’absence de Dieu, puis examinons la puissance du Rosaire.

Dans les temps modernes, l’humanité a commencé à dévier de Dieu au plus tard au cours du XIVème siècle, avec le déclin de la Foi catholique en Dieu et la montée correspondante de l’estime pour l’homme à l’occasion de la prétendue Renaissance, ou ‘Renaissance’ de l’homme révolté. L’idée sous-jacente était que le Moyen Âge avait tellement surestimé Dieu qu’il avait mésestimé l’homme. Au début du XVIème siècle, cette idée a mené à l’explosion de l’humanisme, c’.-à-d. la surévaluation égoïste de l’homme, par Martin Luther (1483–1546), sous la forme du protestantisme. Cette révolte fragmentaire de l’homme subjectif contre l’ordre objectif unifié du Dieu catholique a dominé depuis la ‘civilisation occidentale’ moderne. Or, du protestantisme découle toutes les erreurs les plus importantes de notre temps, par exemple le naturalisme, le rationalisme et surtout le libéralisme au XIXème siècle, puis l’œcuménisme, le modernisme et surtout le communisme au XXème siècle. L’impiété a fait du chemin.

Pendant plus de 400 ans, les Papes catholiques ont maintenu la foi catholique face à Luther, si l’on peut dire, mais avec le Concile Vatican II (1962–1965), ils ont cédé, et en 2024 la voie était libre pour que des Jeux olympiques commencent en tournant en dérision la Sainte Cène. Or, un tel blasphème représente pratiquement la nouvelle religion de la ‘civilisation occidentale’. Pour saisir pleinement combien l’éloignement de l’homme moderne au seul vrai Dieu est profond et durable, il faut lire un portrait de Luther comme celui du philosophe français Jacques Maritain dans son essai Les trois réformateurs. Car le soulèvement violent de Luther contre Dieu était dans les profondeurs mêmes de l’âme humaine. Mais comment peut-on alors prétendre que prier le Rosaire, dévotion simple et répétitive, puisse constituer un remède  ?

Physiquement, le Rosaire occupe, règle et apaise les parties les plus mobiles de l’être humain  : les doigts avec les grains, la bouche avec les prières, l’esprit avec la contemplation des Mystères, les pieds également si l’on marche. Captivée, notre attention inconstante est alors libre de converser intimement avec Dieu, c’.-à-d. de prier. Mon esprit bat-il la campagne  ? Les grains me sortent de la distraction. Et spirituellement, les Mystères sont centrés sur Notre-Seigneur, symétriquement enchâssés dans les Mystères de Notre-Dame (les ‘Mystères lumineux’ ajoutés par les modernistes ne sont pas symétriques et il ne faut pas tenir compte de cette nouveauté)  : Elle Lui donne naissance, Il meurt pour nos péchés, Elle est récompensée par la Royauté sur l’Univers.

Cependant, ‘Rome ne s’est pas faite en un jour’ et le Rosaire lui-même ne peut pas rouvrir le ciel en quelques semaines. Mais celui qui persévère dans la prière du Rosaire a toutes les chances de revenir sur la longueur d’onde du Ciel, et de s’éloigner progressivement toujours plus de celle du Monde. Chaque Mystère possède sa propre leçon divine, et les quinze ensemble me font parcourir tout le cycle de l’histoire de notre Rédemption. Voici pourquoi je suis né, et je n’ai à chercher autre chose nulle part ailleurs. Je passe en revue en moins d’une heure les raisons qui ont mené à la Création. Car nos vies sur terre ne sont pas seulement « méchantes, pauvres, brutales et brèves », comme le dit un philosophe anglais. Pour nous amener au ciel, Notre Seigneur seul a souffert pour nous tous plus que nous ne pourrions jamais souffrir tous ensemble. Je veux aller au ciel. Je serai fidèle à la prière toute particulière que Dieu a donnée à son Église pour m’y amener  !

Kyrie eleison.