Vatican II @fr

Non Seulement… Mais Aussi…

Non Seulement… Mais Aussi… on novembre 30, 2019

Les numéros de ces « Commentaires » peuvent aisément se classer en deux catégories : il y a ceux qui traitent du problème de la société moderne et ceux qui traitent de la solution catholique. Il serait regrettable qu’un certain nombre de lecteurs ne s’intéressent qu’au problème et non à la solution, ou bien à la solution en oubliant le problème. Car, si je connais le problème sans en avoir la solution, je risque sérieusement de tomber dans le désespoir, spécialement aujourd’hui, quand on voit Dieu donner à Ses ennemis la permission de détruire Son Église, ou presque. Mais d’un autre côté, si le fait de connaître la solution m’incite à vivre dans l’illusion en minimisant le problème, alors mon système de défense est vulnérable, et je risque de me faire rattraper par le problème quand je m’y attendrai le moins.

Saint Paul est l’exemple type de celui qui connaissait et le problème et la solution. Car il comprenait d’autant mieux la solution du Nouveau Testament, à savoir : Jésus-Christ (Rom. VII, 24–25), que lui-même avait été un pharisien fervent selon ce pharisaïsme qui avait détourné l’Ancien Testament (I Cor XV, 8–10). C’est parce que Saint Paul avait personnellement fait l’expérience de l’impuissance de l’Ancien Testament à pardonner les péchés qu’il a si bien compris ce que le Christ par le Nouveau Testament avait apporté comme salut aux hommes. Un autre grand converti qui profita des nombreuses années qu’il passa dans l’hérésie fut saint Augustin, qui en devint l’un des plus grands serviteurs de la vérité catholique. Voilà pourquoi certains Français disent : «  Un converti vaut deux apôtres. »

Et voilà pourquoi les catholiques d’aujourd’hui devraient se garder de mépriser la connaissance des ennemis de Dieu et de la façon dont ils Le combattent, aussi répugnant que soit ce combat. Et quant aux non-catholiques, ils seraient mieux avisés de ne pas mépriser l’Église catholique car, aussi déconfite qu’elle puisse paraître aujourd’hui, elle est toujours la seule institution à détenir les vraies solutions à tous les vrais problèmes du monde, c’est-à-dire aux problèmes humains. Car tous les problèmes proprement humains ne sont que le fruit pestiféré des péchés dans les âmes humaines par lesquels l’homme s’élève contre Dieu. Or Dieu seul, et non les psychiatres, peut pénétrer dans ces âmes pour accorder Son pardon, ce qu’Il choisit de faire uniquement par son divin Fils, et par l’Église achetée au prix de Son sang.

Alors, suggérons aux lecteurs non-catholiques de ces « Commentaires » de s’intéresser non seulement aux analyses que l’on y trouve sur les arts modernes ou la politique, mais aussi aux arguments qui peuvent à prime abord sembler n’être que de vaines chamailleries entre catholiques, tels les erreurs de Vatican II ou la glissade de la Fraternité Saint Pie X vers Vatican II. Car s’il est vrai que l’Église catholique est toujours la seule à détenir la vraie solution aux vrais problèmes de tous les lecteurs, néanmoins cette solution est vulnérable, pouvant constamment être falsifiée par les hommes pécheurs. Or, une fois falsifiée, la solution devient une partie du problème. De fait, Vatican II fut le point d’aboutissement logique de plusieurs siècles d’efforts déployés par ceux qui voulaient mettre l’Homme à la place de Dieu. Et quant à La Fraternité Saint Pie X, bien qu’elle ait été conçue et fondée en 1970 pour résister aux erreurs du Concile, elle est tombée, notamment depuis 2012, sous le charme maléfique de ces mêmes erreurs. Par conséquent, les non-catholiques qui cherchent de vraies solutions aux problèmes modernes (qu’ils ne connaissent que trop bien !), devraient examiner les arguments exposés ici à propos de Vatican II et de la FSSPX.

De même, aux lecteurs catholiques de ces « Commentaires » nous suggérons de ne pas suivre uniquement les propos concernant Vatican II et la dangereuse dérive de la Fraternité s’alignant sur le monde moderne, mais aussi les analyses qui fouillent en profondeur ce qui ne va pas dans ce monde. Car, si les dirigeants de la Fraternité vont à la dérive comme ils le font actuellement, n’est-ce pas dû au fait qu’ils sous-estiment le problème de ce monde ? Ne vont-ils pas tout droit à la défaite en menant une guerre sans connaître l’ennemi ? Pourtant, Mgr Lefebvre n’a-t-il pas dit que Vatican II était infesté par le subjectivisme ? Ce qui n’a pas empêché Mgr Fellay d’affirmer un jour que 95% des textes du Concile étaient acceptables ! Et maintenant, alors que Mgr Lefebvre répétait souvent qu’il fallait une longue cuillère pour souper avec les conciliaires romains, ne voit-on pas le successeur de Mgr Fellay, prenant exemple sur ce dernier, se comporter comme s’il se prend pour plus malin que les démons romains ? La vraie force de Mgr Lefebvre n’a pas tellement été son astuce, mais plutôt sa foi et sa fidélité à la vérité catholique. Il en va de même pour la Fraternité qu’il a fondée. Alors, en conclusion, enjoignons nos lecteurs catholiques de ne pas croire qu’ils puissent se passer des analyses de ces Commentaires sur la corruption moderne, même s’il n’est pas toujours agréable de la considérer. Cacher sa tête dans le sable se fait payer cher.

Kyrie eleison.

Conversion Moderne

Conversion Moderne on octobre 19, 2019

Y aurait-il aujourd’hui quelqu’un pour penser que le Bon Dieu a renoncé au gouvernement de Son Église et du monde ? Il serait alors facile de lui opposer les témoignages qui parviennent au bureau de ces « Commentaires ». Ils montrent clairement – à tout le moins de l’avis du commentateur – que le Saint-Esprit est toujours à l’œuvre. Un catholique qui s’était éloigné de l’Eglise nous raconte ci-dessous comment il est revenu à la Foi, comment il a rencontré la Tradition catholique, et peu après, la « Résistance ». Il nous dit le sens qu’il donne à tout cela. Fait remarquable : dans la confusion et le découragement ambiant que nous connaissons tous, ce qu’il écrit ne manque ni de portée ni de sérénité, signe fort qu’il est guidé par la grâce de Dieu.

Je suis marié et ma femme m’a donné deux filles : l’aînée est presque adolescente, la seconde est encore un bébé. Je crois devoir à ma grand-mère mon retour à la Foi. Un jour, il y a cinq ans de cela, alors que je passais devant une église, j’ai soudain pensé à ma grand-mère qui avait l’habitude de dire le chapelet. Je me suis alors senti poussé à entrer dans l’église pour faire une prière. Et depuis ce moment, j’ai recommencé à prieret j’ai de nouveau assisté à la messe. Bien sûr, au début, c’était la Nouvelle Messe. Mais il y a environ trois ans, j’ai découvert l’existence de la Tradition catholique.

Depuis lors, ma famille et moi fréquentons près de chez nous la chapelle de la Fraternité Saint Pie X. Le prêtre et les fidèles ont été très heureux de nous accueillir. Mais je n’ai pas tardé à sentir qu’il y avait dans la chapelle beaucoup de divisions. Vous imaginez facilement la difficulté que j’avais à comprendre de quoi il s’agissait. Venant tout juste d’arriver dans la Tradition, il me fallut beaucoup de patience, de courage et de ténacité pour persévérer et ne pas prendre la fuite dès les six premiers mois ! Mais notre soif de vérité et notre recherche d’enracinement ont été plus fortes que nos doutes ; si bien que nous sommes restés, grâce à Dieu.

J’ai compris que la FSSPX constituait une partie encore saine de la véritable Église du Christ ; c’est pourquoi je reste avec ma famille, au moins pour le moment, dans la Fraternité. Mais afin de continuer à former mon jugement, je n’en écoute pas moins ce qu’ont à dire les sédévacantistes et les « résistants ». J’ai une grande admiration pour Mgr Lefebvre, véritable homme de Dieu et saint successeur des Apôtres. Voir sa Fraternité ainsi vaciller sous la pression infernale du monde est très difficile à supporter ; cela exige de nous toujours plus de prières.

La Fraternité a sans doute encore un grand rôle à jouer, car elle continue à faire beaucoup de bien. Il en va de même pour ce qu’on appelle la « Résistance ». Elle aussi joue, et a raison de jouer, le rôle d’un garde-fou, chaque fois que la Fraternité vacille et chancelle sous les attaques du monde moderne ou face aux tentations que lui proposent les officiels de l’Eglise conciliaire. Je suis convaincu que la « Résistance » exerce une influence capitale. Alors qu’elle semble être extérieure à la FSSPX, Notre Seigneur lui permet d’exister pour faire beaucoup de bien, même au sein de la Fraternité. Personnellement, je me considère comme un résistant convaincu vis-à-vis de ceux qui louvoient et n’attaquent pas clairement et frontalement le Concile Vatican II, nettement inspiré par le diable. Tout bien considéré, comment pourrait-on vivre en vrai catholique aujourd’hui, sans résister partout et toujours ? Etre catholique ici-bas n’est sans doute pas de tout repos, mais n’est-ce pas aussi la plus belle chose qui soit ? Merci, chère grand-mère, d’avoir prié pour moi Jésus et Marie !

Durant cette vie, nous ne pouvons jamais voir Dieu. Mais, du moins nous Le voyons à l’œuvre : la dévotion d’une grand-mère ; la prière d’une âme qui débute, mais dont la démarche est décisive ; l’assistance à la Messe comme étape suivante : la Nouvelle Messe, malgré tout porteuse de quelque grâce, aussi étouffée qu’y soit la grâce de la Messe de toujours ; l’âme catholique à laquelle, par qelque truchement que ce soit, Dieu permet d’accéder à la Tradition ; le refuge dans une chapelle de la Fraternité et le bon accueil réservé aux nouveaux venus, réconfort qui, en fait, préparait l’épreuve suivante ! Épreuve surmontée grâce à tous ces besoins d’enracinement, d’amour et de recherche de la Vérité ; grâce à cette attente gardant l’esprit en veille, malgré la confusion ambiante ; l’estime pour Mgr Lefebvre et l’aversion pour Vatican II ; la réception des bienfaits communiqués tant par la Fraternité que par la « Résistance », chacun de ces mouvements procurant –sans exclusive – ce qu’il peut apporter ; la découverte du sort de tout catholique qui doit nécessairement nager à contrecourant, et enfin la gratitude pour tout ce que Dieu lui a apporté. Beaucoup de leçons en peu de mots. Que Dieu bénisse ce correspondant et les gardent, lui et sa famille, fidèles jusqu’à la mort. Il est en bonne voie.

Kyrie eleison.

“Prométhée” – L’Idolâtrie

“Prométhée” – L’Idolâtrie on juillet 6, 2019

Revenons au plan de l’abbé Calderón – Première partie : dans son essence, Vatican II est une glorification de l’homme, grimée en catholicisme par les responsables de l’Eglise. Deuxième partie : L’Homme Nouveau de Vatican II est un être libéré de tout ; du réel par le subjectivisme ; de la morale par la conscience qui inclinerait naturellement le cœur humain vers le bien ; de sa nature même, par la grâce qui répare sa liberté. Troisième partie : Désormais, l’Eglise de Vatican II ne s’oppose plus au monde, ni aux autres religions ; cette Néo-église est toute de bonté, vouée au dialogue avec tout le monde. Dans la quatrième partie de son livre, l’abbé Calderón se demande si Vatican II est une nouvelle religion. Sa réponse est : oui. Car cette Néo-église ne rend plus à la Sainte Trinité le culte qui lui est dû ; en effet, 1. la Révélation et la Tradition, aussi bien que : 2. l’Acte central du culte ou encore : 3. la croyance au Dieu incarné, sont gravement altérés dans leur substance.

1 La vraie doctrine de l’Église est changée ; voici comment. Un catholique peut croire soit en l’objet de foi lui-même, i.e. l’Incarnation ; soit en une proposition objective exprimant cet objet, i.e. “Dieu s’est incarné”. Sans doute, toute formulation exprime le mystère de manière inadéquate, mais il n’empêche qu’elle l’exprime vraiment, ce qui, pour le croyant, est suffisant pour sauver son âme. Mais la Néo-église est un nid de modernistes et pour les modernistes, aucune proposition ne peut être objective. Par conséquent, pour la Néo-église, il ne peut s’agir que d’une expérience subjective du mystère (Dei Verbum n° 2 ; LG n° 4). Cela revient à livrer la doctrine à toutes sortes d’élucubrations charismatiques. Car, pour la Néo-église, le Mystère se rend présent dans la communauté d’une Église vivante, au sein de laquelle Révélation et Tradition évoluent au fil des contextes historiques. Ce qui veut dire que, pour vivre et interpréter le Mystère, il faut entrer en communion dans la communauté avec un nouvel Esprit de Foi. Les formules qu’on écrira ou les croyances qui émergeront ne feront que suivre cet esprit. On réécrit la foi pour donner un fondement à cette expérience, et pour donner au peuple de Dieu un modèle à suivre. L’orthodoxie nouvelle consiste à penser en communion avec la Néo-église, de sorte que refuser cette Néo-communauté constitue la pire des hérésies. Or c’est là ce que faisait Mgr Lefebvre.

2 Quant au culte, l’importance donnée à la Croix dans cette religion aux teintes moyenâgeuses n’est-elle pas déprimante ? Qu’à cela ne tienne ! La Néo-église éliminera le sacrifice, mais gardera la joie. Toutefois, l’humanité a contracté une dette envers Dieu à cause du péché. Et cette dette a conduit le Christ à nous racheter par le sacrifice. Donc, conclut le moderniste, il importe que nous nous débarrassions de cette idée de péché. Car Dieu est au-dessus de la souffrance : les péchés des hommes ne peuvent Le faire souffrir. Même s’Il se plaint du péché, Il n’ira jamais jusqu’à condamner quiconque aux peines éternelles de l’Enfer. Certes, le Christ est mort, mais simplement en tant qu’instrument du Père (G&S#22). [«  Agneau innocent, par son sang librement répandu, Il nous a mérité la vie ; et, en lui, Dieu nous a réconciliés avec lui-même et entre nous ».] Car il devait montrer sa solidarité avec les hommes. Donc, ce n’est pas tant le Christ qui nous sauve, mais le Père ; et non par la Croix, mais par la Résurrection qui a été accomplie par le Père, afin que l’homme soit glorifié ! Ainsi la Messe, rebaptisée “Mystère pascal”, doit glorifier l’homme, et Dieu doit remercier l’homme d’être si glorieux afin que Lui-même puisse y trouver sa gloire ! Cette série d’absurdités blasphématoires, qui imprègnent nettement la Nouvelle Messe, imposée à l’Église par Paul VI en 1969, est implicite plutôt qu’explicite dans le décret liturgique Sacrosanctum Concilium. Mais le texte date du début du Concile ; or les modernistes devaient à l’époque faire encore preuve de prudence. Ce n’est qu’à partir de 1969 que les freins ont été desserrés. La liturgie de l’Église est maintenant dans le chaos.

3 Quant au Dieu incarné, Jésus-Christ, centre du christianisme et de la vraie Église catholique, deux documents de Vatican II, Gaudium et Spes et Ad Gentes s’y réfèrent spécialement. Pour l’abbé Calderón, ces deux documents développent une doctrine identique : la Croix est horrible ; mieux vaut donc être tout simplement un homme de paix qu’un fils adoptif de Dieu par la souffrance. L’homme est à l’image de Dieu (par sa liberté), si bien que, plus il se fait homme, plus il devient divin. C’est la raison pour laquelle Jésus-Christ s’est fait homme. Non pas pour que l’homme devienne fils adoptif de Dieu, mais pour que l’homme devienne plus pleinement homme ! Au demeurant, on ne trouve nulle part dans les textes de Vatican II que Jésus-Christ soit proprement et véritablement Dieu ; on n’y décèlera pas davantage, ne serait-ce qu’une seule fois, d’allusion à l’union hypostatique. Selon le public auquel ils s’adressent, les théologiens conciliaires font fluctuer leur langage, entre Tradition et Nouvelle Théologie.

4 A la fin de son analyse, l’abbé Calderón conclut que la finalité ultime de Vatican II est la dignité de l’homme ; or, c’est par leur finalité que les religions se spécifient. Le catholicisme place sa finalité dans la gloire (extrinsèque) de Dieu ; Vatican II est donc bien une religion nouvelle car, pour le Concile, la grâce libère la nature humaine ; Jésus est venu pour nous rendre plus humains ; et la Messe n’est plus le sacrifice dû à Dieu, mais l’action de grâce de l’humanité couronnant le Créateur, elle-même étant plus libre que Lui, puisque capable de choisir même le mal !

Kyrie eleison.

“Prométhée” – La Néo-Église

“Prométhée” – La Néo-Église on juin 29, 2019

Dans la deuxième partie de son livre sur Vatican II, l’abbé Calderón étudie l’homme nouveau, tel qu’il émerge du Concile. La troisième partie traite de la Néo-église qui en résulte. Le raisonnement est le suivant : l’unique vraie Religion du seul vrai Dieu a été fondée par Jésus-Christ, Dieu incarné. Sa finalité est “d’enseigner toutes les nations” (Mt XXVIII, 20), car Notre Seigneur a voulu atteindre toutes les âmes pour en sauver le plus grand nombre possible. Mais, afin qu’une Église aussi ambitieuse plût à l’homme contemporain, il fallait protéger l’humanisme moderne, redéfinir la dimension ecclésiale, la réduire et la changer radicalement, tout en dissimulant soigneusement le changement opéré. C’est pourquoi : 1) la Néo-église n’a plus de mission s’étendant sur l’humanité toute entière ; 2) elle s’interdira d’intervenir dans la partie du monde non-religieuse ; 3) et même dans la partie relevant de la religion, elle ne sera plus la seule Église valable : elle devra donc être redéfinie pour remplir son nouveau rôle.

1 La Tradition catholique enseigne que le “Royaume de Dieu” et “l’Église” sont deux expressions désignant une seule et même réalité. Toutes deux ont la même mission de portée universelle. Mais pour adapter cette Église au monde actuel qui, de fait, la rend de moins en moins universelle, Vatican II distinguera entre le Royaume de Dieu, réellement universel, invisiblement présent dans le cœur de tout homme, et la Néo-église, universelle certes, mais seulement par intention, car elle travaille sans cesse à construire et à étendre toujours plus visiblement le Royaume dans la vie concrète des hommes. De plus, la Néo-église est également universelle en tant que “sacrement” ou signe d’unité de tous les hommes (LG,1).

2 Il faut comprendre ici que la Néo-église libère, de toute domination ecclésiale les pouvoirs non-religieux. En effet, la glorification de l’homme a pour conséquence de faire du “Royaume de Dieu” non plus une réalité potentielle destinée à tous les hommes par le baptême, mais une réalité actuelle, pour tous les hommes, rien que par leur nature d’homme. C’est dire que la nature a pris le pas sur la religion. Le rôle de la Néo-église est sans doute de signaler l’universalité du Royaume, mais elle ne peut ni s’en prévaloir ni la revendiquer en exerçant une quelconque autorité. C’est pourquoi la politique se trouve désormais indépendante de la religion. La Néo-église peut tout au plus purifier le pouvoir dans les domaines où il s’exerce. C’est la Nouvelle Chrétienté, annoncée par Maritain, dans laquelle Mammon peut prendre le contrôle du monde, comme nous le voyons depuis Vatican II. En fait, le Concile fut l’aboutissement logique du long déclin de la vraie chrétienté amorcé à partir du Moyen Âge. Mais alors, cette nouvelle chrétienté serait-elle impie ? Non pas, car pour Maritain, ce monde nouveau, ni croyant ni baptisé, est quand même libéré par le Christ et se dirige vers la gloire.

3 Ce rapetissement de l’Église par le libéralisme est suivi de la réduction opérée par l’œcuménisme. Depuis que le protestantisme a brisé l’Église catholique, plusieurs fragments épars ont tenté de se réunir à nouveau. La vraie Église du Christ ne voulait et ne veut toujours pas participer à cette quête vaine de l’unité perdue, tant que les dissidents ne rentrent pas dans l’Église catholique. Mais le dogme de la glorification de l’homme fait que la Néo-église glorifie les non-catholiques et cherche à les rejoindre. C’est ainsi que, parmi les chrétiens non-catholiques, elle glorifiera les “traces” du catholicisme encore présentes, mais sans vie ; par exemple parmi les Orthodoxes, le sacerdoce valide, mais sans juridiction ; parmi les protestants, les Ecritures, mais sans interprétation faisant autorité ; elle verra dans tout cela des “éléments” vivants : « Parmi les éléments ou les biens par l’ensemble desquels l’Eglise se construit et est vivifiée, plusieurs et même beaucoup ; et de grande valeur, peuvent exister en dehors des limites visibles de l’Eglise catholique » ( Ch 1- § 3 Unitatis Redintegratio). Dans l’humanité non-chrétienne, elle mettra en valeur “les germes du Verbe”, c’est-à-dire toutes les vérités et choses bonnes qui sont des étincelles de la Parole qui “éclaire tout homme venant en ce monde” (Jn.I, 9) (Nostra Aetate), car tous les êtres raisonnables ont été élus par Dieu pour Le glorifier, et tout élu est sauvé.

Mais comment le Concile peut-il ainsi apprécier tous les non-catholiques sans déprécier les catholiques ? En déclarant que “l’Église du Christ”, qui embrasse tous les hommes, “subsiste” dans l’Église catholique, autrement dit, qu’elle y existe d’une manière toute spéciale (LG#8). Mais dire qu’elle “subsiste” n’est qu’une ruse verbale, car à mesure que le Concile exalte les non-catholiques, comment peut-il ne pas minimiser l’importance du catholicisme ? Ou encore : s’il ne déprécie pas le fait d’être en dehors de l’Eglise, comment peut-il faire prévaloir l’Eglise catholique ?

4 Enfin, comment définir la Néo-église dans son nouveau rôle ? Elle doit se concevoir comme “Peuple de Dieu”, nécessairement démocratique, en sorte que l’Ordre du sacerdoce se confond avec le “sacerdoce” des laïcs ayant reçu le baptême (I P II, 5), ce qui rend la Néo-église tout entière sacerdotale, dotée d’une mission dans le monde entier ; en sorte que les évêques sont assignés, avec le Pape, à la direction de l’Eglise (LG#22). Pour finir, notons également ce vocable, assez vague, qu’emploie le Concile pour correspondre à l’imprécision des notions de la Néo-église : la “Communion”. Son activité principale consiste dans le “Dialogue” avec tous les hommes, afin que personne n’ait jamais tort, et que chacun puisse être en amitié avec tous. Foin de la doctrine ou de la vérité !

Kyrie eleison.

“Prométhée” – Nouvel Homme

“Prométhée” – Nouvel Homme on juin 22, 2019

L’abbé Alvaro Calderón, dans son livre “Prométhée, la religion de l’homme”, analyse Vatican II comme étant dans son essence un humanisme que les responsables de l’Église ont déguisé en catholicisme. Leur déguisement conférait une autorité sans égale à l’humanisme mais exigeait également d’eux une habileté hors pair pour être mis en place. L’humanisme apparu au XIVe siècle, cherchait à défendre des valeurs purement humaines contre les exigences supposément surhumaines du catholicisme au Moyen Âge, telles la pauvreté, la chasteté et l’obéissance. L’humanisme se voulait aussi une réaction contre l’autorité de l’Église qu’il accusait de traiter les êtres humains comme des enfants. Donc pour affirmer la dignité humaine, l’humanisme s’appuierait sur la liberté humaine, donnant ainsi naissance au libéralisme des XVIIe et XVIIIe siècles, puis au super-libéralisme des XXe et XXIe siècles. L’effort principal de Vatican II sera d’adapter la véritable Église de Dieu à la fausse liberté de ce super-libéralisme. C’est ainsi que le Concile entend “libérer” l’esprit de l’homme par le subjectivisme, à proclamer l’autonomie de la volonté par la “conscience”, et à glorifier la nature humaine en mettant la grâce à servir la nature au lieu de l’élever.

L’erreur du subjectivisme consiste à vouloir rendre la vérité indépendante de l’objet et dépendante du sujet humain. Mais, comme cela mène à la pure folie, Vatican II voulait éviter d’aller jusqu’au bout, tout en voulant suffisamment de subjectivisme pour garantir la liberté de pensée. Voilà pourquoi le Concile a recouru à “l’ inadéquation des formules dogmatiques”. Certes, il est vrai que les paroles humaines ne pourront jamais dire ni exprimer la plénitude des réalités divines, mais elles n’en signifient quand même pas rien. Par exemple, si je dis : “Dieu existe”, j’énonce une vérité, alors que si je dis : “Dieu n’existe pas” j’énonce quelque chose de faux. En fait, les mots ne sont pas totalement inadéquats pour exprimer les dogmes : par exemple, si je crois en un certain nombre de dogmes tels que certains mots les expriment, comme l’Église l’exige de tout catholique, je peux sauver mon âme. Mais, hélas, Vatican II (Dei Verbum) a préféré dire ceci : ce que Dieu révèle, c’est Lui, et non une doctrine composée de mots ; de plus, Il se fait connaître par expérience subjective, et non par des paroles objectives. Parler ainsi entraîne que les doctrines peuvent aller et venir sans qu’on touche aux réalités qui les sous-tendent. Aussi bien Vatican II pourrait-il changer les dogmes qu’il ne s’écarterait pas pour autant de la Vérité ou de la Tradition ! A ce compte, toutes les théologies peuvent être appelées licites, et toutes les religions recevables ! La supériorité du christianisme devient tout au plus une supériorité culturelle !

Voyons maintenant comment Vatican II libère la volonté. En fait, elle est déjà libérée. Dans la mesure où il n’y a plus ni vérité ni mensonge, on peut tout aussi bien affirmer ou nier le bien ou le mal de voler ou de mentir. Encore une fois, cette position conduit à la pure folie. Donc, comment Vatican II allait-il affirmer la liberté de l’esprit tout en évitant de dissoudre toute morale ? La solution se trouvait dans la “conscience”, et voici comment : Dans le cœur de tout homme, Dieu parle, non pas avec des mots, mais par une inclination morale vers le bien et une aversion pour le mal. Il parle d’une manière telle qu’aucune parole n’y est adéquate, mais néanmoins, il exprime à travers les âges une substance immuable. Ainsi, les Dix Commandements ne viennent pas heurter ma volonté de l’extérieur, car c’est moi qui, de l’intérieur, m’incline librement pour accomplir ce qui est juste. Mais concrètement, les choses se passent-elles vraiment ainsi ? Qu’en est-il du péché originel ? En réalité, la morale est objective, elle est rationnelle ; elle peut et doit s’exprimer dans des règles universelles. La seule “conscience” subjective est beaucoup trop faible pour résister au péché originel.

Pour finir, voyons comment Vatican II réussit à mettre la grâce de Dieu en bas, alors qu’elle est bien au-dessus de la nature humaine. Tout simplement en reprenant pour son compte un principe catholique de toujours : “La grâce perfectionne la nature “. Donc pour Vatican II, la grâce perfectionne l’homme en réparant sa plus haute qualité : sa liberté, qui est autrement esclave du péché. Ainsi la grâce du Christ libère et sert la nature humaine, et elle révèle l’homme à lui-même (Gaudium et Spes, n° 24), par l’Incarnation. Mais, au fait, n’est-ce pas plutôt Dieu que l’Incarnation révèle à l’homme ?

En conclusion, l’abbé Calderón montre clairement comment Vatican II, tout en étant un humanisme dans son fond, embellit cet humanisme à l’aide d’un décorum catholique. La liberté, oui, mais à l’image de Dieu ! Le subjectivisme, oui, mais pour trouver la vérité intérieure, où se confond le mystère de Dieu révélant à l’homme le mystère humain ! La conscience, oui bien sûr, parce qu’ elle participe par nature à la Loi Éternelle, afin que les hommes puissent accomplir naturellement la loi ; la volonté de Dieu confirmant ainsi la volonté de l’homme ! La Grace, oui, mais celle-ci perfectionne la nature de l’homme, en nous libérant de l’esclavage du péché ! C’est ainsi que le patrimoine et les richesses de l’Église servent à faire briller de mille feux le nouvel humanisme !

Kyrie eleison.

Prométhée – I

Prométhée – I on juin 15, 2019

Vatican II a été pour l’Église catholique un véritable fiasco. C’est pourquoi il est essentiel, pour que l’Eglise continue, que les catholiques, soucieux du salut de leur âme, s’efforcent d’identifier la cause d’un tel désastre. Il y a dix ans, le P.Alvaro Calderón, professeur de philosophie et de théologie thomiste au Séminaire Sacerdotal de la Fraternité Saint Pie X à La Reja (Argentine), a écrit un livre sur Vatican II pour montrer comment ce Concile avait substitué une religion de l’homme à la religion de Dieu. Ce livre comprend quatre parties : la première expose d’abord la nature de Vatican II, en donnant une définition en trois parties : l’officialisation d’un humanisme, grimé en catholique.

Vatican II, c’est d’abord un humanisme ; autrement dit, une glorification de l’homme usurpée aux dépens de Dieu. Certes, après le Moyen Age, se succédèrent une série d’humanismes : la Renaissance, la Réforme, la Révolution française. Cependant, à chaque fois, l’humanisme mourait de lui-même, dit Calderón, car il se coupait de l’Église catholique. Le résultat de tout cela ? Deux guerres mondiales ! Mais cette fois-ci, les ecclésiastiques eux-mêmes élaborèrent un humanisme nouveau qui serait compatible avec l’Église catholique. D’où l’introduction officielle, sans précédent, lors de Vatican II, de ce que l’Eglise avait toujours condamné comme étant une erreur grave. Mais cette fois-ci, les clercs avaient réussi à donner à cette erreur une apparence catholique. De cette façon, leur nouvel humanisme leur permettait de tendre la main au monde moderne centré sur l’homme, sans se couper de l’Église. Pour quel motif ? Soi-disant pour sauver à la fois l’homme moderne de son impiété, et l’Église de son isolement stérile. Au mieux, disons que les ecclésiastiques de Vatican II avaient de bonnes intentions ; au pire, ils savaient pertinemment que cette nouvelle alliance de forces contraires qu’ils proposaient ne servirait à rien sauf à détruire l’Église. Mais n’était-ce pas justement-là ce que voulaient les pires d’entre eux ?

Maintenant, examinons en quoi cette alliance nouvelle ne pouvait pas fonctionner. Tout simplement parce que Paul VI voulait instaurer un humanisme nouveau, qui ne serait ni inhumain, – c’est-à-dire tout orienté vers Dieu, comme l’était supposément la religion au Moyen Âge – ni totalement orienté contre Dieu, comme à notre époque moderne. Il devait réaliser un nouvel équilibre entre ces deux excès : un humanisme montrant combien la plus grande gloire de Dieu coïncide avec la gloire de l’homme. Assurément, l’homme est le chef-d’œuvre de la création. C’est pourquoi glorifier l’homme revient à glorifier Dieu. Et l’homme, par sa liberté, est l’image de Dieu. Donc, plus il est libre, plus il glorifie Dieu. Par conséquent, promouvoir la dignité et la liberté humaines, c’est non seulement glorifier l’homme, mais également Dieu. Toutefois, en partant du principe de la gloire de l’homme, qui ne voit le risque de s’en tenir en premier à la gloire de l’homme ? Plus profondément, Dieu est le seul et unique Etre Parfait qui n’a nullement besoin d’être ou de vouloir quoi que ce soit en dehors de Sa propre gloire intrinsèque. Ce n’est que pour Sa gloire extrinsèque qu’Il peut, à titre secondaire, vouloir ou désirer la bonté d’une créature en dehors de Lui-même. Au final, la vérité est que tout, en Dieu, comme dans l’homme, se rapporte d’abord et entièrement à Dieu ; et ce n’est que secondairement qu’on peut dire que Dieu est orienté vers l’homme.

A titre d’exemple, voici quelques citations tirées du document de Vatican II, Gaudium et Spes dont l’ambiguïté n’échappera à personne : “Tout sur la terre doit être ordonné à l’homme comme à son centre et à son sommet [ . . . ] (L’homme) a été constitué seigneur de toutes les créatures terrestres, pour les dominer et pour s’en servir en glorifiant Dieu “ (§ 12) : Puisque l’homme doit agir en glorifiant Dieu, n’est-ce pas plutôt Dieu qui est au centre et au sommet de toute la création ? “L’amour de Dieu et du prochain est le premier et le plus grand commandement “ (§ . 24) – Le prochain apparaît-il dans la première table des commandements ? [Certes, l’Écriture enseigne que « l’ amour de Dieu est inséparable de l’amour du prochain ». Mais ne convient-il pas de distinguer entre le créateur et la créature ?] “L’homme est la seule créature aimée de Dieu pour lui-même “ (§ . 24). Pour l’homme lui-même ? La déviation est grave, mais subtile. Dans les textes du Concile, elle reste plutôt implicite qu’explicite, mais elle se dévoile clairement dans l’enseignement de l’Église après le Concile, par exemple dans le Nouveau Catéchisme (cf. 293, 294, 299). En effet, dit l’abbé Calderón, le Concile place l’homme sur le trône de la Création, et met Dieu à son service.

De même, Vatican II renverse l’autorité. L’humanisme va toujours contre l’autorité. Mais, dans la mesure où le Nouvel Humanisme se doit d’avoir une apparence catholique, il fallait chercher une autre voie pour que l’autorité du Christ règne à la fois dans l’Église et dans le monde. Or, le Christ n’a-t-il pas dit qu’il était venu pour servir ? (Mt XXV, 25–28). Ainsi, la solution est trouvée ; la hiérarchie devra se rendre démocratique de haut en bas, afin de servir l’homme moderne d’une manière comprise par lui. Mais, dans cette nouvelle hiérarchie, comment l’autorité de Dieu pourra-t-elle élever les hommes au Ciel ? Elle sera dissoute, et avec l’autorité dissoute dans l’Église, l’autorité sera partout dissoute, comme nous pouvons le constater autour de nous en 2019.

Dans la seconde partie, l’Abbé Calderón présentera l’Homme Nouveau de Vatican II ; la partie III traitera de la Nouvelle Église ; la partie IV de la Nouvelle Religion.

Kyrie eleison.