Mgr Marcel Lefebvre

Doctrine Minée

Doctrine Minée on mai 26, 2012

On a écrit des livres entiers sur la liberté religieuse telle qu’elle a été enseignée par Vatican II dans sa Déclaration de 1965, Dignitatis Humanae. Pourtant l’enseignement révolutionnaire de ce document est clair : étant donné la dignité naturelle de tout être humain, aucun État ni groupe social ni pouvoir humain ne peut obliger ni forcer aucun homme ni groupe d’hommes à agir, en privé ou en public, contre ses propres croyances religieuses, du moment que l’ordre public ne soit pas troublé (D.H.#2).

Au contraire l’Église catholique a toujours enseigné jusqu’au Concile Vatican II que chaque État en tant que tel a le droit et même le devoir d’interdire à ses citoyens de pratiquer en public leurs fausses religions, autrement dit toute religion non-catholique, tant qu’une telle interdiction est favorable et ne nuit pas au salut des âmes. (Par exemple en 2012 le culte de la liberté est si répandue qu’une telle interdiction scandaliserait les citoyens de presque tous les États et ne ferait que les pousser à mépriser au lieu d’apprécier la religion catholique. Dans ce cas-là, ainsi que l’Église l’a toujours enseigné, l’État peut s’abstenir de faire usage de son droit d’interdire les fausses religions.)

Or le point précis sur lequel ces deux doctrines se contredisent peut paraître bien limité, à savoir qu’un État puisse ou non interdire la pratique publique de fausses religions, mais les conséquences sont énormes : Dieu est-il le Seigneur ou le serviteur des hommes ? Car si d’une part l’homme est une créature de Dieu, et s’il est social de par sa nature (cela saute aux yeux lorsqu’on observe comment les hommes se réunissent en toute sorte d’associations, notamment l’État), il s’ensuit que la société et l’État sont également des créatures de Dieu qui lui doivent donc leur service comme ils le doivent à son unique véritable religion, en interdisant les fausses religions au moins dans le domaine public (qui relève de l’État), dans la mesure où cela facilitera le salut des âmes et n’y fera pas obstacle.

D’autre part, si la liberté humaine a tant de valeur qu’il faille laisser à tout homme la liberté de corrompre ses concitoyens par la pratique publique et le prosélytisme de n’importe quelle fausse religion de son choix (l’ordre public restant sauf), il faut alors laisser aux fausses religions la liberté de prospérer dans le domaine public, comme le font les sectes protestantes en Amérique latine actuellement. D’où il s’ensuit que la différence entre les fausses religions et la vraie religion est moins importante que la dignité humaine ; que la vraie religion n’est plus si importante ; que la valeur de Dieu comparée à la valeur de l’homme n’est plus si transcendante. Et c’est ainsi que Vatican II rabaisse Dieu dans la mesure où il élève l’homme. En définitive Vatican II remplace la religion de Dieu par la religion de l’homme. C’est avec raison que Mgr. Lefebvre a fondé la Fraternité St Pie X pour exalter la dignité et la valeur transcendantes de Dieu, de Notre Seigneur Jésus Christ, dans une Église et un monde devenus fous, enivrés par la dignité de l’homme.

Mais voici qu’un chef religieux vers le début de ce mois a prononcé en public : « Beaucoup sont ceux qui comprennent le Concile de travers. » La liberté religieuse, a-t-il dit, « il y a plusieurs façons de l’utiliser, mais en y regardant de plus près, j’ai vraiment l’impression que peu de gens savent ce qu’en dit réellement le Concile. Le Concile présente une liberté religieuse qui est une liberté très, très limitée ; très limitée . . . » A la question si le Concile lui-même, c’est-à-dire pris dans son ensemble, appartient à la Tradition catholique, il a répondu, « J’espère que oui ! »

Voyez pour vous-mêmes cette interview, prononcée en anglais et accessible sur YouTube sous le titre de « Traditionalist leader talks about his movement, Rome » Qui peut être surpris si « son mouvement » traverse en ce moment la crise la plus grave de ses 42 ans d’existence ?

Kyrie eleison.

L’Oecuménisme de Benoît – V

L’Oecuménisme de Benoît – V on mai 19, 2012

Vu la nécessité de diviser une longue argumentation en plusieurs parties, certains lecteurs peuvent avoir perdu le fil conducteur de plusieurs Commentaires sur « l’Œcuménisme de Benoît ». Résumons l’argument jusqu’ici :—

EC 241 a établi quelques éléments de base : l’Église Catholique est un tout organique ; parmi les croyances duquel si quelqu’un en prend et en laisse, c’est un « choisisseur », c’est-à-dire (selon le grec) un hérétique. Plus encore, s’il emporte avec lui une croyance catholique hors de l’Église, celle-ci ne restera pas la même, un peu comme si de l’oxygène est obtenu à partir de l’eau par électrolyse, il cesse d’être partie d’un liquide pour devenir un gaz. L’œcuménisme Conciliaire suppose qu’il y a des croyances que des non-catholiques ont en commun avec les catholiques, mais en réalité même la formule « je crois en Dieu » est sujette à être assez différente selon qu’elle est incorporée à un système de croyances protestant ou un credo catholique.

EC 247 a utilisé une autre comparaison pour illustrer comment des parties du tout Catholique ne restent plus les mêmes lorsqu’elles ne font plus partie de ce tout. Des pièces d’or peuvent rester des pièces d’or identiques lorsqu’elles se trouvent séparées du tas de pièces, mais la branche coupée d’un arbre vivant devient quelque chose de tout à fait différent : du bois mort. L’Église ressemble davantage à l’arbre qu’aux pièces, pour la bonne raison que Notre Seigneur a comparé son Église à une vigne, et de fait il dit que toute branche coupée est jetée au feu et brûlée (Jn.XV,6 – observation intéressante : aucune branche vivante ne porte autant de fruits qu’une branche de vigne, aucun bois mort n’est aussi inutile que du bois de vigne mort). Ainsi, des parties coupées de l’Église catholique ne restent point catholiques, comme le prétend l’œcuménisme Conciliaire.

EC 249 a montré comment les documents de Vatican II promeuvent ces idées fausses de l’œcuménisme, mais auparavant EC 248 a dû avertir les lecteurs que l’ambiguïté de ces documents est notoire. Aussi ce Commentaire a-t-il cité le passage de Dei Verbum (# 8) qui a ouvert la porte à la fausse notion des modernistes de la « Tradition vivante ». EC 249 présentait ensuite trois textes conciliaires cruciaux pour l’œcuménisme des modernistes : Lumen Gentium (# 8) qui suggère que la « véritable » Église du Christ est plus ample que l’« étroite » Église catholique, et Unitatis Redintegratio (# 3) qui suggère en premier lieu que l’Église est formée d’« éléments » ou parties qui peuvent se rencontrer aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur de l’Église catholique (comme les pièces de monnaie identiques dans le tas ou en dehors du tas), et en second lieu que ces éléments peuvent par conséquent servir à sauver les âmes aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur de l’Église catholique.

EC 251 finalement en vint à l’œcuménisme de Benoît XVI en particulier. Les citations de l’abbé Joseph Ratzinger présentées par le Dr. Schüler dans son livre Benoît XVI et comment l’Église se voit elle-même, démontrent comment la conception de l’Église du jeune théologien des années 1960 correspondait parfaitement au schéma des pièces d’or à l’intérieur et à l’extérieur du tas. Certes, des citations postérieures montrent qu’étant plus âgé comme Cardinal puis comme Pape il s’est ensuite, de façon constante, efforcé de maintenir l’équilibre entre les deux schémas de l’Église comme tas de pièces et comme tout organique, mais le Dr. Schüler relève bien dans son argumentation que le fait même de cet effort pour maintenir cet équilibre présuppose chez le Pape que la moitié de lui-même croit encore en une Église qui correspond au schéma du tas de pièces de monnaie.

A moins que les lecteurs ne demandent les citations textuelles de Joseph Ratzinger pour être sûrs que nous n’en avons pas forcé l’interprétation ou que nous ne les avons pas sorties de leur contexte, le dernier Commentaire de cette série aura pour conclusion une application de ces démonstrations à la situation de la Fraternité Saint Pie X de Monseigneur Lefebvre. D’un côté la Fraternité fait partie du véritable tout catholique « un, saint, catholique et apostolique ». D’un autre côté mieux lui en a pris d’éviter de faire partie de ce tout Conciliaire malade.

De même qu’une branche saine greffée sur un arbre Conciliaire malade, la Fraternité se serait inévitablement laissée contaminer par la maladie Conciliaire. D’aucune façon une simple branche ne saurait guérir cette infection mortelle qui est répandue dans toute l’Église Conciliaire.

Kyrie eleison.

Assassins de la Foi

Assassins de la Foi on mai 12, 2012

Mais si Rome offre à la Fraternité Saint Pie X tout ce qu’elle veut, pourquoi donc la Fraternité devrait-elle encore refuser ? Apparemment il y a des catholiques qui croient encore que si un accord pratique répond à toutes les demandes pratiques de la Fraternité, il devrait être accepté. Et pourquoi pas ? Parce que ce ne fut pas en vue du bien de la Fraternité que Monseigneur Lefebvre l’a créée, mais pour la survie de la Foi catholique menacée par Vatican II comme jamais elle ne l’a été dans le passé. Mais voyons maintenant pourquoi les autorités de la Nouvelle Église s’efforceront autant d’obtenir un accord pratique que la Fraternité devra le refuser.

La raison en est que la Nouvelle Église est subjectiviste, et tout accord purement pratique implique que le subjectivisme soit la vérité. Selon la nouvelle religion conciliaire, les dogmes de la Foi ne sont pas des vérités objectives mais des symboles qui satisfont des nécessités subjectives ( Pascendi, 11–13, 21). Par exemple, si mon insécurité psychologique se trouve tranquillisée par la conviction que Dieu s’est fait homme, alors, pour moi, l’Incarnation est vraie, dans le seul sens possible du mot « vrai ». C’est ainsi que si les Traditionalistes sentent la nécessité de l’ancienne religion, alors c’est elle qui est vraie pour eux, et on peut même admirer à quel point ils s’accrochent à leur vérité. Mais, en toute justice, ils doivent à leur tour concéder à nous autres Romains de garder notre vérité Conciliaire, et s’ils en sont incapables, alors leur arrogance et intolérance se font insupportables, et nous ne pouvons permettre une telle dissension à l’intérieur de notre Église d’amour, amour, amour.

C’est pourquoi la Rome Néo-moderniste se contenterait de n’importe quel accord pratique par lequel la Fraternité renoncerait, ne fût-ce qu’implicitement, à sa revendication radicale selon laquelle « ses » vérités s’imposent à tous. Par contre, la Fraternité ne peut se contenter d’aucun accord dont l’acceptation parlerait plus fort que n’importe quel discours pour nier l’objectivité de « sa » religion de 20 siècles. Car il ne s’agit point de « sa » religion à elle. Donc de deux choses, l’une : ou bien pour arriver à un accord avec des subjectivistes, je dois nécessairement cesser d’insister sur l’objectivité. Ou bien pour insister sur l’objectivité, je ne puis accepter aucune proposition présentée par des subjectivistes, tant qu’ils ne renoncent pas à leur subjectivisme.

Or ces Romains ne font rien de tel. Et comme dernière preuve de leur insistance pour imposer cette nouvelle religion dont ils se font les croisés, ils viennent de produire leur récente « Note sur les conclusions de la visite canonique à l’Institut du Bon Pasteur » en France. Les lecteurs se rappelleront que cet Institut fut un de plusieurs fondés suite au Concile pour permettre au catholicisme Traditionnel de s’exercer sous l’autorité de Rome. Comme on le voit, pour s’assurer que la pauvre victime est bien prise dans le piège, cette Rome peut attendre quelques années avant de se jeter sur sa proie, mais inexorablement le piège se ferme . . .

La « Note » exige que Vatican II et le Catéchisme de 1992 de la Nouvelle Église soient inclus dans les études du séminaire de l’Institut. L’Institut doit insister sur l’« herméneutique du renouveau dans la continuité ». Il ne doit plus dire que la Messe de St Pie V est le rite « exclusif » de l’Institut. Il doit participer à la vie diocésaine officielle dans un « esprit de communion ». En d’autres mots, l’Institut Traditionnel doit cesser d’être tellement Traditionnel s’il veut appartenir à la Nouvelle Église.

Mais alors, l’Institut espérait-il autre chose ? Pour être fidèle à la Tradition, il faudrait qu’il se libère de nouveau de sa soumission à l’autorité de la Nouvelle Église. Est-ce possible ? Ils se sont mis d’eux-mêmes dans la gueule du monstre Conciliaire. A lui maintenant de les avaler.

Alors, au nom du Ciel, comment veut-on qu’il en aille autrement pour la Fraternité Saint Pie X ? La Fraternité pourra cette fois-ci rejeter la tentation de Rome, mais ne nous faisons aucune illusion : les subjectivistes reviendront encore, encore et encore, jusqu’à ce qu’ils réussissent à se débarrasser de cette vérité et de cette Foi objectives qui constituent un reproche permanent à leur délire criminel.

Kyrie eleison.

L’Oecuménisme de Benoît – III

L’Oecuménisme de Benoît – III on avril 21, 2012

Il y a deux semaines se trouvait dans ce « Commentaire » la promesse d’examiner trois citations de Vatican II qui ont beaucoup contribué à la dissolution de l’Église de Jésus-Christ, laquelle est l’Église catholique. Il y a une semaine s’y trouvait l’avertissement que les textes de Vatican II sont ambigus, de telle sorte qu’on peut toujours les interpréter comme s’ils ne contiennent aucune erreur. Mais si l’une des deux significations est innocente, l’autre est mortelle pour l’Église catholique, comme l’ont prouvé ces quarante dernières années.

La première citation est prise de Lumen Gentium # 8. La voici : « Cette unique Église du Christ . . . comme société constituée et organisée en ce monde, c’est dans l’Église catholique qu’elle subsiste, gouvernée par le successeur de Pierre et les évêques qui sont en communion avec lui ». Mais que signifie ce mot « subsiste » ici ? L’ambiguïté réside en ce que ce mot peut signifier ou bien que l’Église du Christ existe principalement et uniquement dans l’Église catholique romaine, vérité que l’Église a toujours enseignée jusqu’à Vatican II, ou bien que l’Église du Christ existe principalement mais non pas uniquement dans l’Église catholique, auquel cas l’Église du Christ existe aussi en partie en dehors de l’Église catholique. Ceci ouvre la porte à l’œcuménisme conciliaire qui détruit la proclamation dogmatique selon laquelle l’Église catholique est l’unique arche de salut : « Extra Ecclesiam nulla salus » (en dehors de l’Église, pas de salut).

Le problème ici, c’est que c’est aussi un dogme que l’Église est une. Lors de chaque Messe dominicale nous écoutons ou nous chantons que nous croyons à « l’Église une, sainte, catholique et apostolique ». Donc, comment l’Église du Christ peut-elle être divisée en quelques communautés plus ou moins semblables à une église ? Si l’Église est une, elle ne peut être plusieurs. Si elle est plusieurs, elle ne peut être une. Dans son livre sur « Benoît XVI et comment l’Église se voit elle-même », le Dr. Wolfgang Schüler donne une série de citations de Joseph Ratzinger pour montrer comment en jeune théologien il a promu avec enthousiasme la destruction de l’exclusivité de l’Église Catholique, mais comment en tant que Cardinal et Pape il a lutté pour maintenir en même temps l’unicité de l’Église.

La deuxième citation est prise de Unitatis Redintegratio # 3 : « Parmi les éléments ou les biens par l’ensemble desquels l’Église se construit et est vivifiée, plusieurs et même beaucoup, et de grande valeur, peuvent exister en dehors des limites visibles de l’Église catholique ». Or, la signification évidente de ces paroles c’est que de même que des pièces d’or peuvent former un tas, mais enlevées au tas elles restent des pièces identiques d’or comme avant, ainsi les éléments de l’Église, dont le Concile cite comme exemples « foi, espérance, charité et autres dons de l’Esprit Saint », peuvent être reconnus comme existant identiques hors de l’Église catholique. Mais Notre Seigneur dit que les branches coupées de sa vigne sèchent et meurent (Jn.XV, 6). Et quelle est sa vigne si ce n’est son Église ?

La troisième citation tire la conclusion logique, un peu plus loin dans le même document (U.R. # 3) : « En conséquence, ces Églises et communautés séparées (de l’Église catholique) . . . ne sont nullement dépourvues de signification et de valeur dans le mystère du salut. L’Esprit du Christ, en effet, ne refuse pas de se servir d’elles comme de moyens de salut . . . ». Mais comme l’a dit Monseigneur Lefebvre : « Dans la mesure où ces communautés se trouvent séparées de l’Église catholique, elles ne peuvent jouir de l’assistance de l’Esprit Saint, puisque leur séparation signifie une résistance à l’Esprit Saint. Celui-ci ne peut agir directement que sur des âmes, il ne peut utiliser directement que des moyens, qui ne montrent aucun signe de séparation ».

Vatican II a mal compris ce qu’est l’essence même de l’Église. Voyons ensuite avec l’aide du Dr. Schüler comment Benoît XVI a en même temps et freiné et accéléré cette incompréhension.

Kyrie eleison.

Ambiguïté Conciliaire

Ambiguïté Conciliaire on avril 14, 2012

Imaginez un soldat d’infanterie fort et bien armé qui en poursuivant l’ennemi tombe dans des sables mouvants. Voilà ce qui arrive à un catholique courageux armé de la vérité qui s’aventure à critiquer les documents de Vatican II. Là on se trouve dans des sables mouvants d’ambiguïté, réalisés expressément dans ce but. Si la religion de l’homme y avait été exposée à ciel ouvert, les Pères du Concile auraient rejeté ces documents avec horreur. Mais la nouvelle religion y fut habilement camouflée par une rédaction faite exprès pour permettre deux interprétations contradictoires. Prenons un exemple clair, et d’une importance cruciale.

Dans la section 8 de Dei Verbum il existe un passage sur la Tradition que Jean Paul II a utilisé pour condamner Monseigneur Lefebvre en 1988. Voici le texte lui-même : « A/ Cette Tradition qui vient des Apôtres progresse dans l’Eglise sous l’assistance du Saint Esprit ; B/ en effet, la perception des réalités aussi bien que des paroles transmises s’accroît, C/ soit par la contemplation et l’étude des croyants qui les méditent en leur cœur . . . D/ soit par l’intelligence intérieure qu’ils éprouvent des réalités spirituelles, E/ soit par la prédication de ceux qui, avec la succession épiscopale, ont reçu un charisme certain de vérité ».

Or la vraie Tradition catholique est radicalement objective. Tout comme le bon sens nous dit que la réalité est objective, dans ce sens que les objets sont ce qu’ils sont en dehors de nous et indépendamment de ce que n’importe quel observateur subjectif voudra qu’ils soient, de même l’Eglise véritable enseigne que la Tradition catholique, venant de Dieu, est telle qu’il l’a faite, en sorte qu’aucun être humain ne peut en modifier même le moindre détail. Voici donc ce que serait l’interprétation catholique du texte que nous venons de citer :

« A/ A mesure que le temps passe il y a un approfondissement dans la façon dont les catholiques saisissent les vérités immuables de la Foi. B/ Les Catholiques peuvent découvrir toujours plus dans ces vérités, C/ en les contemplant et en les étudiant, D/ en y pénétrant plus profondément, et E/ par le fait que les évêques prêchent certains nouveaux aspects de ces mêmes vérités ». Cette interprétation est parfaitement catholique puisque tout changement se situe du côté des gens, qui en effet changent avec le passage du temps, tandis qu’aucun changement ne se situe du côté des vérités révélées qui forment le Dépôt de la Foi, c’est-à-dire la Tradition.

Mais voyons maintenant comment le même texte de Dei Verbum peut être compris non pas objectivement mais subjectivement, car on y fera dépendre des sujets catholiques le contenu même des vérités et on le fera changer avec eux : « A/ La vérité catholique vit et croît suivant le cours du temps parce que B/ les catholiques vivants ont des perceptions que les catholiques du passé n’ont jamais eues puisque C/ ceux qui vivent découvrent dans leur cœur, au fond d’eux-mêmes, des vérités fraîches, D/ fruit de leur propre expérience spirituelle interne. En outre, E/ la Vérité catholique s’accroît quand les évêques prêchent des choses auparavant inconnues, pour la bonne raison que les évêques ne peuvent dire quoi que ce soit de contraire à la vérité ( !) ». (En d’autres mots, ayez la religion qui vous fasse vous sentir bien dans votre peau, mais n’oubliez pas de « payer, prier et obéir » à nous autres modernistes).

Or, voici l’immense problème : si l’on accuse ce passage de Dei Verbum de promouvoir le modernisme, les catholiques conservateurs (qui ne conservent guère plus que leur foi en des hommes d’église sans foi) répliquent immédiatement que la seule véritable interprétation du texte en question est la première signalée ci-dessus. Mais en réalité lorsque Jean Paul II dans Ecclesia Dei Adflicta a utilisé ce même passage pour condamner Monseigneur Lefebvre et partant les Consécrations de 1988, comment aura-t-il pu le faire sinon en interprétant ce passage dans son sens moderniste ? De telles actions parlent plus fort que les paroles.

Chers lecteurs, lisez et relisez ce même texte, et puis ses deux interprétations, jusqu’à ce que vous découvriez pour vous-mêmes toute l’ambiguïté diabolique de ce Concile lamentable.

Kyrie eleison.

Danger Grave

Danger Grave on mars 31, 2012

Le désir de certains prêtres dans la Fraternité Saint Pie X de rechercher un accord pratique avec les autorités de l’Eglise sans accord doctrinal semble être une tentation apte à se reproduire. Pendant des années Monseigneur Fellay en tant que Supérieur Général de la Fraternité en a refusé l’idée, mais lorsqu’il a dit à Winona le 2 février que Rome est disposée à accepter la Fraternité telle qu’elle est, et que Rome est prête à satisfaire « toutes les demandes de la Fraternité . . . au niveau pratique », Rome semble bien présenter une fois de plus la même tentation.

Cependant, plusieurs parmi vous connaitront les dernières nouvelles de Rome, et, à moins que le Vatican ne joue une partie de cartes avec la Fraternité Saint Pie X, Rome a annoncé vendredi dernier, le 16 mars, qu’elle a trouvé que la réponse de janvier de Monseigneur Fellay à son Préambule Doctrinal du 14 septembre de l’année dernière « n’est pas suffisante pour surmonter les problèmes doctrinaux qui sont à la base de la fracture entre le Saint-Siège et la dite Fraternité ». Et le Vatican a donné à la Fraternité Saint Pie X un mois pour « clarifier sa position » et éviter ainsi « une rupture aux conséquences douloureuses et incalculables ».

Mais que se passerait-il si Rome tout d’un coup n’exigeait plus l’acceptation du Concile et de la Nouvelle Messe ? Si Rome se mettait inopinément à dire : « Bien. Nous avons réfléchi à tout cela. Rentrez dans l’Eglise tels quels. Nous vous accorderons la liberté de critiquer le Concile tant que vous voudrez, et de célébrer exclusivement la Messe de St Pie V. Mais rentrez donc ! » Cela pourrait être assez rusé de la part de Rome, car comment la Fraternité pourrait-elle refuser une telle offre sans paraître incohérente et pleine d’ingratitude ? Et cependant, sous peine de mort elle devrait refuser. Peine de mort ? Expression forte. Mais voici à ce sujet un commentaire de Monseigneur Lefebvre.

Le 5 mai 1988, il signa avec celui qui était alors le Cardinal Ratzinger le protocole (première rédaction provisoire) d’un accord pratique Rome-Fraternité. Le 6 mai il revint sur sa signature (provisoire). Le 13 juin, il dit : « Avec le protocole du 5 mai nous étions bientôt morts. Nous n’aurions pas duré un an. Jusqu’à présent la Fraternité est unie, mais avec ce protocole nous aurions été tenus de multiplier les contacts avec eux, il y aurait eu la division à l’intérieur de la Fraternité, tout aurait été une cause de division (caractères gras ajoutés). De nombreuses vocations seraient venues vers nous à cause de notre union à Rome, mais de telles vocations n’auraient toléré aucun désaccord avec Rome – ce qui aurait provoqué la division. Dans la situation actuelle, les vocations se trient d’elles-mêmes avant de nous rejoindre » (ce qui est encore le cas dans les séminaires de la Fraternité).

Et pourquoi une telle division ? La guerre parmi les vocations n’en aurait été qu’une occasion parmi d’innombrables autres. Evidemment, parce que le Protocole du 5 mai aurait signifié un accord pratique reposant sur un désaccord doctrinal qui est radical : entre la religion de Dieu et la religion de l’homme. Monseigneur Lefebvre continuait : « Ils sont en train de nous tirer vers le Concile . . . tandis que de notre côté nous sommes en train de sauver la Fraternité et la Tradition en faisant attention de garder nos distances » (caractères gras ajoutés). Pourquoi alors Monseigneur Lefebvre a-t-il jamais recherché un tel accord ? Il continuait : « Nous avons fait un effort honnête pour garder la Tradition tout en restant dans l’Eglise officielle. Cela s’est avéré impossible. Ils n’ont pas changé, si ce n’est en pire. »

Et ont-ils changé depuis 1988 ? Beaucoup penseraient, seulement en pire encore.

Kyrie eleison.