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Réponse a la Lettre Ouverte de Mgr. Nicola Bux

Réponse a la Lettre Ouverte de Mgr. Nicola Bux on mars 24, 2012

Londres, le 22 mars 2012.

Monseigneur,

Dans une lettre ouverte du 19 mars, adressée à Monseigneur Fellay et à tous les prêtres de la Fraternité Saint Pie X, vous nous priez avec insistance d’accepter l’offre sincère et chaleureuse de réconciliation que le Pape Benoît XVI présente à la Fraternité Saint Pie X pour guérir la fracture de longue date entre Rome et la Fraternité Saint Pie X. Permettez-moi, en tant que l’un des prêtres à qui vous vous êtes adressé, de prendre sur moi de vous dire ce qui me semble aurait pu être la réponse de ce « grand homme d’Eglise » que fut Monseigneur Lefebvre.

Votre lettre commence par un appel à « tout sacrifier au nom de l’unité ». Mais il ne peut y avoir de véritable unité catholique qui ne soit fondée sur la vraie Foi catholique. Le grand Archevêque a tout sacrifié pour l’unité dans la vraie doctrine de la Foi. Hélas, les Discussions Doctrinales de 2009–2011 ont prouvé que la fracture doctrinale entre la Rome du Vatican II et la Fraternité Saint Pie X est aussi large que jamais.

Cette fracture vous l’avez décrite le 19 mars comme n’étant pas plus que des « perplexités qui demeurent, des points devant être approfondis ou détaillés », mais le 16 mars le Cardinal Levada fut catégorique à déclarer que la position prise par Monseigneur Fellay le 12 janvier est « insuffisante pour surmonter les problèmes doctrinaux ». Monseigneur Fellay a fait observer une fois combien de divergences il peut y avoir entre les hommes d’Eglise de Rome, mais quoi qu’il en soit de leur unité entre eux, dans tous les cas la Foi sacrifiée à l’unité fera une unité sans Foi.

Bien sûr, comme vous nous le rappelez, l’Eglise est une institution à la fois divine et humaine. Bien sûr, l’élément divin ne peut faillir, et de plus, bien sûr, l’Eglise en définitive ne peut faillir, et le soleil s’y lèvera de nouveau. Mais veuillez nous pardonner de ne pas être d’accord lorsque vous dites que l’aube est à portée de main, parce que cette vraie Foi que la Fraternité Saint Pie X a soutenue dans les Discussions ne brille pas dans la Rome de Vatican II. En conséquence la Fraternité Saint Pie X ne peut s’y trouver en sécurité. Elle ne pourrait pas non plus être source de lumière si elle aussi adoptait les ténèbres conciliaires.

On n’a pas besoin de mettre en doute la sincérité du désir du Pape de faire bon accueil au retour de la Fraternité Saint Pie X dans une « pleine communion ecclésiale », comme l’ont montré plusieurs gestes de réelle bonne volonté de sa part, mais « une commune profession de Foi » entre la Fraternité et ceux qui croient au Concile Vatican II, est exclue, à moins que la Fraternité Saint Pie X n’abandonne cette Foi qu’elle a défendue dans les Discussions. Et quand un tel abandon fait crier à la Fraternité Saint Pie X « A Dieu ne plaise ! », tant s’en faut que sa voix soit étouffée, elle est entendue dans le monde entier, et elle porte pour l’Eglise catholique d’aujourd’hui des fruits plutôt exceptionnels.

Certainement, « c’est le bon moment », certainement « l’heure favorable est venue » pour une solution à l’agonie et aux problèmes de l’Eglise et du monde. Toutefois, c’est la solution que notre Mère du Ciel demande depuis longtemps, et qui dépend uniquement du Saint Père. De fait, lorsque Notre Seigneur a placé cette solution entre les mains de sa Mère, Elle a dit qu’aucune autre solution ne fonctionnerait, en sorte que pour permettre à toute autre solution de fonctionner, Notre Seigneur devrait faire de Sa Mère une menteuse ! Inconcevable !

La solution est connue depuis longtemps. En effet, comment le Ciel pourrait-il avoir laissé le monde dans une détresse comme celle des 100 dernières années sans lui offrir un remède semblable à celui offert par le prophète Elisée pour guérir la lèpre du Général Syrien Naaman ? D’un point de vue humain, se baigner dans la rivière du Jourdain semblait ridicule, mais personne ne pouvait dire que c’était impossible. Il suffisait d’un peu de foi et d’humilité. Le Général païen réunit alors assez de foi et de confiance en l’homme de Dieu pour faire ce que le Ciel lui demandait, et bien sûr, il fut guéri instantanément.

Puisse le Saint Père seulement réunir assez de foi et de confiance en la promesse de la Mère du Ciel ! Qu’il saisisse seulement ce « bon moment » avant que toute l’économie globale ne s’effondre en ruines, et avant que des politiciens fous ne réussissent à lancer la Troisième Guerre mondiale au Moyen Orient ! Nous l’en supplions, nous l’implorons, qu’il sauve l’Eglise et le monde en faisant tout simplement ce qu’a demandé la Mère du Ciel. Il ne s’agit pas là d’une chose impossible. Elle vaincrait tous les obstacles sur son chemin. En faisant ce qu’elle demande, le Pape est le seul qui puisse désormais nous sauver de souffrances qui dépassent toute imagination, mais qu’il pourrait nous épargner.

Et s’il désirait que par la prière ou l’action la modeste Fraternité Saint Pie X l’aidât à consacrer la Russie au Coeur Immaculé de Marie en union avec les évêques du monde entier, que la Reine du Ciel rassemblerait, il doit savoir qu’il peut compter en première ligne sur l’appui de Monseigneur Fellay et des trois autres évêques de la Fraternité Saint Pie X, dont le moindre est

Votre serviteur dévoué dans le Christ, +Richard Williamson.

Un Tournant

Un Tournant on mars 10, 2012

Parlant aux Etats-Unis le mois dernier au sujet des relations entre Rome et la Fraternité Saint Pie X, le Supérieur Général de la Fraternité a dit qu’un accord pratique entre les deux parties serait possible si Rome acceptait la Fraternité telle qu’elle est, et il a signalé que Monseigneur Lefebvre avait souvent dit qu’un tel accord serait acceptable. Cependant, Monseigneur Fellay a ajouté que la dernière fois que Monseigneur Lefebvre l’a dit fut en 1987. Ce petit rajout est hautement significatif, et mérite d’être approfondi, surtout pour une jeune génération qui peut ne pas être familiarisée avec le drame historique des Consécrations Episcopales de 1988.

De fait, le drame des drames, sans lequel la FSSPX n’aurait jamais vu le jour, ce fut le Deuxième Concile du Vatican (1962–1965), où la grande majorité des évêques catholiques a accepté cette « mise à jour » de l’Eglise par laquelle ils ont scindé leur autorité catholique d’avec la vérité de la Tradition catholique. A partir de ce moment, les Catholiques ont dû choisir entre l’Autorité et la Vérité. Jusqu’à ce jour, s’ils choisissent l’Autorité, la Vérité ne peut que leur manquer, et s’ils choisissent la Vérité, ils désireront toujours être réunis avec l’Autorité. Monseigneur Lefebvre a choisi la Vérité, et c’est pourquoi il a fondé pour la défendre la Fraternité en 1970, mais tant qu’il le pouvait il a fait tout dans son pouvoir pour ne pas s’éloigner de l’Autorité, en s’efforçant d’obtenir pour sa Fraternité l’approbation de Rome. C’est pourquoi Monseigneur Fellay a raison de dire que jusqu’en 1987 Monseigneur Lefebvre a toujours cherché à obtenir un accord pratique avec Rome.

Cependant, en 1987, Monseigneur Lefebvre avait 82 ans. Il prévoyait que sans ses propres évêques, le maintien de la Tradition par la Fraternité prendrait nécessairement fin. Il devenait urgent d’obtenir de Rome au moins un évêque mais Rome a temporisé, sans doute parce qu’elle aussi se rendait bien compte que la Fraternité sans ses propres évêques disparaîtrait de mort lente. En mai 1988 celui qui était alors le Cardinal Ratzinger a tellement temporisé qu’il a fait comprendre à Monseigneur Lefebvre que la Rome néo-moderniste n’avait aucune intention de d’approuver, encore moins de protéger la Tradition catholique. Ainsi, la diplomatie ne servant plus, il a procédé aux Consécrations Episcopales, en disant que désormais ce devait être la doctrine ou rien. Désormais le prélude absolument nécessaire à tout contact entre Rome et la Fraternité, disait-il, serait que les Romains professent leur foi dans les grands documents antilibéraux de la Tradition catholique, par exemple, Pascendi, Quanta Cura, etc.

Et c’est pourquoi, comme Monseigneur Fellay l’a suggéré le 2 février, jamais plus on n’a entendu de la bouche de Monseigneur Lefebvre, jusqu’à sa mort en 1991, qu’un accord pratique serait possible ou désirable. Ce grand Archevêque était allé aussi loin que possible pour obtenir de l’Autorité le minimum qu’exigeait la Vérité. Il a même suggéré une fois qu’en mai 1988 il était allé trop loin. Mais à partir de ce moment-là il n’a plus hésité, il ne s’est plus compromis, et il a encouragé quiconque voulait l’écouter à faire de même.

La situation, a-t-elle changé depuis ? Rome, est-elle revenue à la profession de la Foi de toujours ? On pourrait le croire quand Monseigneur Fellay nous informe dans le même sermon que Rome, en modifiant la rigueur de sa position du 14 septembre, déclare maintenant qu’elle est disposée à accepter la Fraternité telle qu’elle est. Mais il suffit de se rappeler Assise III et la néo-béatification de Jean-Paul II de l’année dernière pour soupçonner que derrière cette nouvelle bienveillance des prélats de Rome envers la Fraternité, se trouve selon toute vraisemblance la conviction que l’euphorie des contacts mutuels rétablis et prolongés finira par diluer et à la longue dissoudre la résistance jusqu’ici obstinée de la Fraternité à leur nouvelle Eglise. Hélas.

« Notre salut est dans le nom du Seigneur ».

Kyrie eleison.

L’Oecuménisme de Benoit – I

L’Oecuménisme de Benoit – I on février 25, 2012

Une remarquable étude de l’œcuménisme conciliaire est apparue en Allemagne il y a quelques années, écrite par un certain Dr. Wolfgang Schüler. Dans « Benoît XVI et Comment l’Eglise se Voit Elle-même », il démontre que l’œcuménisme répandu par Vatican II a transformé la compréhension qu’Elle a d’Elle-même, et il prouve par une série de citations textuelles de Joseph Ratzinger comme prêtre, Cardinal et Pape, que celui-ci a promu cette transformation d’une façon parfaitement cohérente, depuis l’époque du Concile jusqu’à aujourd’hui. Et ce ne sera pas pour lui de quoi avoir honte.

Dans un ordre logique – cela prendra plus d’un « Commentaire Eleison » – voyons d’abord la véritable conception que l’Eglise a d’Elle-même, et alors avec l’aide du Dr. Schüler, comment cette conception fut changée par le Concile et comment Benoît XVI a promu d’une façon cohérente ce changement. Finalement nous tirerons les conclusions qui s’imposent pour les catholiques qui veulent garder la vraie Foi.

La vraie Eglise catholique s’est toujours vue Elle-même comme un tout organique, une société une, sainte, catholique et apostolique, constituée par des êtres humains unis par la Foi, les sacrements et la hiérarchie romaine. Cette Eglise est tellement une, qu’aucun élément ne peut en être arraché ni enlevé sans cesser d’être catholique (cf. Jn. XV, 4–6). Par exemple, la Foi qui constitue l’élément de base du croyant catholique ne peut être fragmentée, mais doit être gardée dans son intégralité (au moins implicitement) ou pas du tout. Et cela parce que c’est sur l’autorité de Dieu révélant les dogmes de la Foi catholique que je crois en eux, de telle sorte que si je rejette un seul dogme, je rejette du coup l’autorité de Dieu qui les cautionne tous, auquel cas même si je crois à tous les autres dogmes, ma croyance ne repose plus sur l’autorité de Dieu mais seulement sur mon propre choix.

En réalité le mot « hérétique » vient du mot grec « choisir » (hairein), car la croyance d’un hérétique étant fondée uniquement sur son propre choix, il a par là même perdu la vertu surnaturelle de foi, de telle sorte que même s’il ne rejette qu’un seul dogme de Foi, il n’est plus catholique. Dans une célèbre citation, Saint Augustin dit : « Sur beaucoup de choses vous êtes avec moi, sur peu vous n’êtes pas avec moi, mais à cause de ce peu pour lequel vous n’êtes pas avec moi, le beaucoup pour lequel vous êtes avec moi ne vous sert à rien. »

Par exemple un Protestant peut croire en Dieu ; il peut même croire à la divinité de l’homme Jésus de Nazareth, mais s’il ne croit pas à la Présence Réelle de Dieu, corps, sang, âme et divinité, sous les apparences du pain et du vin après leur consécration à la Messe, alors il a un concept profondément différent et déficient de l’amour de Jésus-Christ et du Dieu auquel il croit. Peut-on alors dire que le vrai Protestant et le vrai Catholique croient au même Dieu ? Vatican II dit qu’on peut le dire, et sur la base de croyances qu’il suppose plus ou moins partagées entre les catholiques et tous les non-catholiques, il construit son œcuménisme. Au contraire le Dr. Schüler illustre par une série de comparaisons que lorsque deux croyances qui semblent être la même font en réalité partie de deux credo différents, ce n’est plus du tout la même croyance. Voici une illustration : les molécules d’oxygène mélangées à l’azote sont exactement les mêmes qui se composent avec l’hydrogène, mais elles sont aussi différentes dans les deux cas que l’air que nous respirons (O+4N) est différent de l’eau que nous buvons (H2O) ! A suivre.

Kyrie eleison.

Angélisme Mortel

Angélisme Mortel on février 11, 2012

En discernant ce qui fit de T.S. Eliot (1888–1965) « indiscutablement le plus grand poète de langue anglaise au 20 ème siècle », un écrivain anglais conservateur de nos jours, Roger Scruton, a des choses intéressantes à suggérer aux Catholiques dont la foi pend à un fil en ces premières années du 21 ème siècle – bref, la solution est dans la souffrance même ! Si nous sommes crucifiés par le monde autour de nous, voilà la Croix que nous devons porter.

Eliot était en poésie un ultra-moderniste. Comme le dit Scruton, « Il a renversé le 19 ème siècle dans la littérature et inauguré l’âge de la versification libre, de l’aliénation et de l’expérimentation. » On pourrait bien se demander si la combinaison de haute culture et d’Anglicanisme à laquelle est arrivé finalement Eliot est une solution suffisante aux problèmes qu’il abordait, mais on ne peut nier qu’avec son célèbre poème, La Terre Désolée de 1922, il a ouvert la voie à la poésie anglaise contemporaine. L’énorme influence de ses poèmes a démontré au moins qu’Eliot avait mis le doigt sur la plaie de notre époque. C’est un homme moderne et il aborda de front le problème de l’époque moderne, résumé par Scruton avec ces mots : « fragmentation, hérésie et incroyance ».

Cependant, La Terre Désolée ne pourrait être le chef d’œuvre qu’il est, s’il n’avait su trouver un sens au chaos. Il s’agit en fait d’un portrait brillant en pas plus de 434 lignes de la « civilisation » européenne détruite, telle qu’elle émergeait des ruines de la Première guerre mondiale. Et comment Eliot a-t-il réussi ce coup ? Parce que, comme le dit Scruton, l’ultra-moderniste Eliot était aussi un ultra-conservateur. Eliot s’était imprégné des grands poètes du passé, en particulier de Dante et de Shakespeare, mais aussi de maîtres plus modernes, tels Baudelaire et Wagner, et en lisant La Terre Désolée on voit clairement que c’est l’appréciation de l’ancien ordre chez Eliot qui l’a rendu capable de saisir le désordre de l’époque actuelle.

Scruton commente que lorsque Eliot balaya d’un revers de main la grande tradition de la poésie romantique anglaise du XIX ème siècle, c’est parce que le romantisme ne correspondait plus à la réalité de son époque. « Il croyait que l’usage par ses contemporains d’une diction poétique dépassée et de rythmes doucereux trahissait une grave faiblesse morale : un refus d’appréhender la vie telle qu’elle est en réalité, un refus de sentir ce qui doit être ressenti envers cette expérience contemporaine à laquelle nous ne pouvons échapper. Et ce refus ne se limitait pas, selon Eliot, à la littérature, mais embrassait tout l’ensemble de la vie moderne. » La recherche d’un nouveau langage littéraire de la part d’Eliot faisait donc partie pour lui d’une recherche plus large – « la recherche de la réalité de l’expérience moderne ».

Or n’avons-nous pas vu, ne voyons-nous pas toujours à l’intérieur de l’Eglise la même « grave faiblesse morale » ? On peut donner le nom de « Cinquantisme » à cette faiblesse de l’Eglise des années 1950 qui fut la cause directe du désastre de Vatican II dans les années 1960. Mais qu’était-ce sinon le refus de voir carrément le monde moderne tel qu’il est ? L’illusion que tout était beau, que tout le monde était gentil ? L’illusion qu’il suffira que je m’emmitoufle dans une sentimentalité angéliste pour que les problèmes de l’Eglise dans le monde Révolutionnaire s’évanouissent tout simplement ? Et que signifie maintenant l’illusion que Rome désire réellement rétablir la Tradition catholique sinon essentiellement le même refus de la réalité moderne ? Comme Eliot nous a fait comprendre que cette sentimentalité est la mort de la vraie poésie, de même Monseigneur Lefebvre nous a montré qu’elle est la mort du véritable catholicisme. Cet Archevêque ultra-conservateur était en même temps le plus moderne des catholiques fidèles.

Catholiques, la réalité d’aujourd’hui peut nous crucifier par l’un ou l’autre de ses nombreux moyens corrompus, mais réjouissez-vous, encore une fois, dit Saint Paul, réjouissez-vous, car ce n’est qu’en acceptant la Croix qui nous revient aujourd’hui à chacun de nous que nous ferons notre propre salut, et que nous construirons le seul avenir du catholicisme.

Kyrie eleison.

Maladie Mentale

Maladie Mentale on janvier 21, 2012

Un ami m’a présenté récemment une série d’arguments pour montrer pourquoi la FSSPX devrait faire un accord avec Rome, bien que les Discussions doctrinales de 2009–2011 aient montré que le désaccord doctrinal Rome-FSSPX est radical. Que l’un de ses arguments fasse le sujet de ce Commentaire-ci, car je crois qu’il ouvre la compréhension de la pleine dimension du problème auquel la FSSPX est confrontée.

Si la FSPX ne « normalise » pas bientôt sa position vis-à-vis de Rome, écrit-il, elle court le risque de perdre son sens de l’Eglise. Car il y a des laïcs et même des prêtres de la FSSPX qui sont à l’aise dans leur situation présente anormale et qui s’y sont adaptés, parce que la FSSPX « a tout ce dont elle a besoin, en particulier des évêques ». Une telle adaptation, écrit mon ami, tend vers une mentalité schismatique et un sédévacantisme pratique, sinon théorique. J’ai répondu qu’à mon avis un risque bien plus grand que celui de se laisser gagner par une mentalité schismatique est celui de contracter « la maladie spirituelle et mentale des Romains d’aujourd’hui en les fréquentant de trop près ». Une réponse scandaleuse ? Que je m’explique.

« Maladie mentale » est le mot appliqué à des hommes d’Eglise à Rome avec lesquels un autre ami s’est récemment entretenu longuement. Il dit que ce sont des hommes intelligents et sincères, parfaitement capables de saisir les arguments en faveur de la Tradition qui leur sont présentés, mais il conclut, « Ce sont des malades mentaux, mais ils ont l’autorité ». Certainement qu’en disant « malades mentaux » il ne pense nullement à injurier personnellement ces Romains, car il exprime quelque chose de beaucoup plus sérieux qu’une simple injure personnelle. Il signale l’état objectif des esprits romains, tel que ses conversations avec eux l’ont confirmé. Leurs esprits ne se préoccupent plus de vérité.

Un troisième ami, ayant lui aussi eu à parler avec des Romains, m’a dit la même chose avec des mots différents. Je lui demandais, « N’auriez-vous pas pu aller au fond du problème en abordant avec eux la question fondamentale de l’esprit et de la vérité ? ». Il répondit : « Non. Tout ce qu’ils auraient dit, c’est que c’est eux l’autorité, que l’Eglise catholique c’est eux, et que si nous voulons être catholiques, c’est à eux de nous dire ce qu’il faut pour l’être ». Comme une voiture marche à l’essence, de tels esprits ne marchent plus à la vérité mais à l’autorité. Or, le lait est une chose merveilleuse, bien sûr, mais imaginez un automobiliste qui insisterait avec le plus grand sérieux pour remplir le réservoir de sa voiture avec du lait ! Le problème gigantesque du monde moderne presque entier, c’est qu’il a perdu tout sens et amour de la vérité. L’Eglise a résisté le plus longtemps possible à cette perte de la vérité, mais avec Vatican II cette dernière résistance s’est aussi effondrée.

Car le monde moderne est éblouissant et d’un puissant attrait, et Rome de même ! Voici comment un ami Italien ressent le magnétisme des bureaux du Vatican : « Pénétrer dans les palais de Rome est une entreprise hasardeuse car l’air même que l’on respire à l’intérieur est irrésistible. Si on est fasciné par ces salles vénérables, c’est moins par le charme des personnages officiels (beaucoup ne sont pas charmants du tout !) que par l’impression qu’elles inspirent de tous leurs 2000 ans d’histoire de l’Eglise. S’agit-il de la fascination du Ciel ? De l’Enfer ? En tout cas l’atmosphère même du Vatican séduit les visiteurs et entraîne leur volonté ».

Et la fascination du Vatican ne constitue qu’une petite partie de la pression totale du monde moderne qui s’infiltre dans les esprits pour les mettre au pas, et les entraîner à sa suite. Cher ami, je préférerais être un sédévacantiste schismatique qu’un apostat romain. Mais Dieu aidant, je ne serai ni l’un ni l’autre !

Kyrie eleison.

Religion d’État ? – III

Religion d’État ? – III on janvier 14, 2012

Proclamer que les Etats n’ont pas besoin de professer ni de protéger la religion catholique est une erreur libérale classique, et l’une des plus grandes erreurs du Vatican II. Le libéralisme a dit, pour ainsi dire, « N’attaquons pas de front le Catholicisme, mais divisons pour régner. Divisons l’homme individuel d’avec la société en prétendant que l’homme n’est pas un animal social, et alors nous pourrons prétendre que la religion est uniquement une affaire individuelle. Cela nous permettra de nous emparer de la société, et une fois que nous l’aurons rendue libérale, nous pourrons la retourner contre l’individu en arme puissante pour le rendre lui aussi libéral, parce que, bien sûr, l’homme est un animal social ! Et alors si un quelconque individu ne veut pas être libéral, il aura de grandes difficultés à résister à sa société que nous aurons rendue libérale ». N’en est-il pas ainsi ? Regardez autour de vous ! Répondons alors à trois nouvelles objections à la doctrine selon laquelle, pour le salut des âmes, tout Etat devrait être catholique.

Excellence, Notre Seigneur lui-même a dit, « Rendez à César les choses qui sont de César, et à Dieu les choses qui sont de Dieu » (Mt.XXII, 21). Ici Notre Seigneur sépare clairement l’Eglise de l’Etat. Par conséquent aucun Etat ne devrait être impliqué dans le Catholicisme ni dans n’importe quelle autre religion.

Réponse : non, Notre Seigneur ne sépare pas ici l’Eglise de l’Etat ! Il ne fait que distinguer selon le bon sens entre ce que l’individu doit à l’Etat (impôts, etc.) et ce qu’il doit à Dieu (culte). En aucune façon Notre Seigneur ne dit que l’Etat temporel ne doit rien au Dieu éternel. De fait l’Etat, en tant qu’il est l’autorité collective temporelle d’une réunion d’êtres humains, doit à Dieu dans ses actes d’autorité ce que ces êtres humains doivent à Dieu en tant qu’ êtres sociaux, à savoir, l’observance de sa loi naturelle, et quant à l’Eglise, dont la raison naturelle par elle-même peut discerner qu’elle est la vraie, l’Etat lui doit une reconnaissance et soutien social, dans la mesure où cela ne sera pas contre-productif pour le salut des âmes.

Mais c’est à l’individu qu’il revient de discerner quelle est la vraie religion. Comment alors l’Etat en tant qu’Etat peut-il être obligé par principe d’être Catholique ?

Réponse : l’Etat n’est rien d’autre que l’association morale (c’est à dire non-matérielle) dans un corps politique d’un plus ou moins grand nombre d’êtres humains physiques (c’est-à-dire matériels). Or, chacun de ces êtres humains, rien que par l’usage correct de sa raison naturelle, avec ou sans la vertu surnaturelle de la Foi, est capable de discerner que Dieu existe, que Jésus-Christ est Dieu, et que l’Eglise Catholique est la seule Eglise fondée par Jésus-Christ. Si alors tel Etat ne discerne pas quelle est la vraie religion, ce n’est pas parce que ses citoyens ne peuvent pas la discerner, mais bien parce que diverses raisons font qu’ils ne la discernent pas ou ne veulent pas le faire, alors qu’ils en seraient bien capables par l’usage droit de la raison que Dieu leur a donnée. Devant Dieu ils porteront tous une responsabilité plus ou moins grande, parfaitement mesurée par Lui selon les conditions qui sont les leurs, pour ne pas l’avoir fait.

Mais, Excellence, si vous insistez sur l’obligation de chaque Etat à être Catholique, vous ferez tout simplement que les gens se braquent contre la bonne doctrine.

Réponse : C’est pour la gloire de Dieu et le salut éternel des âmes que chaque Etat devrait être catholique. Ainsi pour des hommes trop ignorants ou corrompus pour que cette vérité fasse autre chose que les aliéner, on peut, sans diminuer le principe, hésiter à le proclamer, mais cela ne le rend pas moins vrai pour autant. Les vrais principes ne sont pas moins vrais parce qu’il faut exercer parfois dans la pratique une certaine prudence dans la façon dont on les proclame. Assurément, aux lecteurs de ce « Commentaire » on peut dire la vérité entière !

Kyrie eleison.